Dans le monde de la bière il n’y a pas que des verres clinquants, des cuivres rutilants et de chouettes étiquettes. Même si les amateurs connaissent certaines faces cachées de la bière comme le nom des brasseurs, les levures utilisées, le lieu de production, l’histoire de la brasserie et autres légendes, derrière tout cela se trouve aussi un côté plus obscur. Des pratiques pas jolies-jolies, des trafics, des combines, des arnaques, des tracas, des maladies, des parasites, des nuisibles, des pollutions et d’autres dangers qui rôdent. Nous ne vivons pas dans un monde de bisou-mousse.
Accords illicites, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Belgique, les plus grands groupes se sont fait et se font encore épingler, et bim! La Suisse, elle, a mis un terme à un obscur partage du marché interne, au nom très évocateur : le Cartel, un système d’entente légal entre état et brasseries. Ailleurs, des sociétés françaises sont montrées du doigt dans d’autres parties du globe et dès qu’il y a des interdits des contrebandiers agissent, dès qu’il peut y avoir spéculation des marchés parallèles fleurissent. Mais que fait la police ?
L’alcoolisme, définitivement classé côté obscur de notre boisson favorite, est un fléau à dénoncer et nous le combattons en mettant en avant la qualité de la bière, l’art de la dégustation, les accords mets-bière, le travail des brasseurs etc… Pierre-André DUBOIS l’écrivait déjà dans son premier article paru dans la gazette N°1 en 1986 » Un verre, deux verres, pas trop ! » comme dirait Denis : rendez-vous compte ! « Boire un petit coup c’est agréable » disait la chanson, vous connaissez la suite. Oui pour quelques lapées et non pour de grandes lampées, siroter sa bière en voilà une jolie expression. Quelques rares bizarreries de la nature seront excusées et pour certains hauts placés personne n’ose encore se prononcer…
La Loi Evin est contournée, les grandes marques font appel à des agences spécialisées pour s’en accommoder ou plus discrètement à des influenceuses (très sympathiques au demeurant) sur les réseaux sociaux. Axel Kahn, président de la Ligue contre le cancer, dénonçait les bières trop fortes à l’attention des jeunes et les stratégies utilisées pour installer l’addiction. N’oubliez pas, le dry january vous veut du bien ! Et de nombreuses bières savoureuses et à faible teneur en alcool apparaissent chez les artisans, on vous aide même à les brasser.
La guerre ! Entre nous, un brasseur d’Etreux, nommé Pabert, touché par la guerre et témoin de son époque n’en donne pas vraiment envie. D’autres guerres se déroulent, les guerres de marchés, guerre entre industriels et artisans, guerre des prix. Une petite pensée pour les pauvres brasseurs orphelins qui n’attendent qu’une chose : être adoptés. Comme on dit : « Qui veut la paix prépare la bière ». Et, en ces temps pandémiques, le mot pénurie revient à nos oreilles, pénurie de bière, pénurie de matières premières, de matériel, voire même de bouteilles.
Les accidents du travail, la rémunération du brasseur, la convention collective du métier son rarement mis en avant aussi. Il en est de même pour la légalité du brassage amateur qui à priori était une zone « grise », obscure, il n’y a pas si longtemps encore.
On parle aujourd’hui d’empreinte écologique, de rejet des eaux usées, de bilan carbone, durabilité, OGM, mais à la base se sont de vrais problèmes pour l’industrie brassicole et heureusement les solutions sont là, c’est une filière industrielle entière qui se développe, les brasseries sont sous la lorgnette. Il n’empêche que de très anciens dangers subsistent encore, sulfure d’hydrogène, CO2 incolore inodore et depuis tout temps les ravageurs sans pitié et maladies qui agissent en silence, discrètement, bien cachés et quand on s’en aperçoit il est trop tard. Infections, contaminations, la solution c’est la prévention.
Peu exposés sur la place publique également, les dépôts de bilan, les reventes et autres entrées discrètes au capital, l’espionnage industriel, les brevets sur le breuvage, impôts, taxes, abus d’aides publiques rythment aussi, hélas, la vie trépidante des entreprises. Il y a aussi l’inflation du prix de la pinte, mais ça ils ont du mal à nous le cacher hé hé.
Alors les amis certes ce côté obscur de la bière n’a rien à voir avec des EBC supérieurs à 46, brune, stout, noire, porter, ce sera pour une autre fois. Heureusement, en tant que dégustateurs vous le savez, tout est question d’équilibre et si du côté obscur on trouve des bières aux noms évocateurs de Lucifer, Mort subite, Fin du monde, Corbeau, Démon, Troll et Anges déchus, d’un autre côté on trouvera des Paix Dieu ainsi que tous ses saints, St Sixtus, St Landelin, St Arnould, et même des Fées bien sympathiques. Alors, hop, après tant d’émotions, un petit coup d’Eau Bénite, on sonne l’Angélus, quelques Pater et la Messe est dite. Que la force soit avec vous.
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Pierre ULTRÉ